March 19, 2024, Tuesday, 78

Diffraction des rayons X

Un article de Cristallographie.

Les techniques de diffraction des rayons X sont des outils de prédilection pour l’analyse des problèmes de cristallographie. Elles ont pris leur essor à partir de 1912, date à laquelle M. von LAUE et ses collaborateurs ont réussi à obtenir le premier diagramme de diffraction des rayons X par un cristal. La technique a évolué très rapidement, cependant il a fallu attendre les récents progrès informatiques pour que la technique de diffraction sur poudre (donnant des diagrammes bien plus complexes) puisse être appliquée de façon usuelle à la résolution de structures cristallines complexes.

Les méthodes diffractométriques donnent deux types d’informations :

  • Structurales : paramètres de maille, distribution des atomes,…
  • Microstructurales : taille de grains, contraintes, texture,…

Elles consistent à faire interagir un rayonnement X incident (de longueur d’onde λ connue) avec la matière, puis à mesurer les phénomènes d’interférence. On considère la partie élastique de l’interaction avec la matière, c'est-à-dire qu’il y a conservation de l’énergie du rayonnement. Dans le cas d’un objet diffusant périodique (par exemple un cristal), on observe une diffusion intense dans des directions discrètes : cette forme de diffusion est appelé diffraction.

On peut observer des phénomènes de diffraction si la longueur d’onde du rayonnement est de l’ordre de grandeur des distances interatomiques (quelques angströms). Dans les cristaux ces paramètres sont de quelques angströms, ce qui est compatible avec la longueur d’onde des rayons X.

Sommaire

Théorie de la diffraction des rayons X

Pour qu’il y ait diffraction d’une onde dans une direction donnée, il faut que toutes les mailles d’un cristal, c'est-à-dire tous les nœuds d’un réseau, diffusent un rayonnement en phase dans cette direction.

Diffusion par les atomes
Diffusion par les atomes

Il existe plusieurs manières d’exprimer cette condition de diffraction, dont la condition de Bragg :

Condition de Bragg
Condition de Bragg

Quand la différence de marche entre les rayons incidents et les rayons diffractés par les atomes est égale à un nombre entier de fois la longueur d'onde, c'est-à-dire quand la loi Bragg est satisfaite, il y a interférence constructive dans des directions discrètes de réflexion sélective appelées réflexions de Bragg.

Illustration de la condition de Bragg : réflexion sélective sur une famille de plan (hkl)
Illustration de la condition de Bragg : réflexion sélective sur une famille de plan (hkl)

Une manière de représenter graphiquement cette condition de diffraction est la représentation d’EWALD. On construit une sphère de rayon 1/ dont un des diamètres représente le faisceau direct. On place à une intersection de celui-ci avec la sphère l’origine du réseau réciproque du cristal. Ce réseau réciproque est une structure "artificielle" reliée directement au réseau réel du cristal, où chaque point de ce réseau appelé nœud, représente une famille de plan (hkl) du réseau réel. Notamment la distance d’un nœud du réseau (hkl) à l’origine est égale à l’inverse de la distance interréticulaire pour la famille de plan (hkl).


Pour réaliser une expérience de diffraction, on fait tourner le réseau réciproque (c’est à dire le cristal) autour d’un axe passant par son origine. Lorsqu’un nœud du réseau réciproque traverse la sphère d’Ewald, la relation de Bragg est satisfaite pour ce nœud est un faisceau diffracté est émis dans la direction 2 correspondante. On peut récolter un diagramme de diffraction en plaçant un écran perpendiculairement au faisceau direct.


Exemple de diagramme de diffraction des rayons X sur cristal tournant réalisé en simulant les intersections entre la sphère d'Ewald et le réseau réciproque avec le logiciel  DiffractOgram (réalisé par l’ : Ecole Polytechnique de Lausanne)
Exemple de diagramme de diffraction des rayons X sur cristal tournant réalisé en simulant les intersections entre la sphère d'Ewald et le réseau réciproque avec le logiciel DiffractOgram
(réalisé par l’ :
Ecole Polytechnique de Lausanne)

Méthodes des poudres

Le monocristal de la construction d’Ewald est remplacé par une poudre polycristalline. La diffraction des rayons X sur poudre part du principe que l’échantillon contient un très grand nombre de cristallites d’orientations parfaitement aléatoires, si bien que toutes les familles de plans se trouvent sous incidence dite de Bragg.

La méthode générale consiste à bombarder l'échantillon avec un faisceau de rayons X monochromatique, et à mesurer l'intensité des rayons X qui est diffusée selon l'orientation dans l'espace.


Les cristallites de la famille de plan (hkl) répondant à la condition de Bragg vont diffracter en formant un cône de révolution ayant pour axe le faisceau incident appelé cône de diffraction :

Cône de diffraction
Cône de diffraction

On observera donc sur le diagramme de diffraction des rayons X sur poudre, de nombreux cercles concentriques représentant les différentes familles de plan (hkl) présentes dans le matériau :

Exemple de diagramme de diffraction des rayons X sur poudre réalisé en simulant les intersections entre la sphère d'Ewald et le réseau réciproque avec le logiciel DiffractOgram
Exemple de diagramme de diffraction des rayons X sur poudre réalisé en simulant les intersections entre la sphère d'Ewald et le réseau réciproque avec le logiciel DiffractOgram

Affinements de structure

Les mesures de diffraction des rayons X (dans notre cas sur poudres) nous fournissent la valeur de l’intensité pour chaque angle 2theta. A partir de ces valeurs on trace un diagramme de diffraction des rayons X. A ce stade un grand travail d’interprétation reste à accomplir. Celui-ci est réalisé à l’aide de différents outils informatiques, en particulier les logiciels EVA et FullProf.


Indentification des pics avec le logiciel EVA

La première étape de l’interprétation est de rechercher sur le diagramme la présence des différentes phases. Le logiciel EVA permet de positionner les pics de composés présents dans sa base de donnée sur notre diagramme mesuré. Une recherche par élément chimique permet d’établir une liste de composés potentiels. Pour affirmer la présence de l’un d’entre eux il faut retrouver sur notre diagramme mesuré la totalité de ses pics.


Exemple d'identification de pics avec EVA
Exemple d'identification de pics avec EVA

Principe de la méthode d’affinement

L’étape suivante est la détermination pour chaque phase des paramètres de maille ainsi que la position des atomes. Différentes méthodes ont été élaborées pour y parvenir. Nous avons employé la méthode de Rietveld.

Un diagramme de diffraction de poudre retranscrit une information à trois dimensions. Aussi certains pics se chevauchent sur notre diagramme à une dimension, et il est difficile de travailler sur un seul pic. Un diagramme doit donc être étudié dans son ensemble.

On calcule à partir d’un modèle un diagramme théorique, puis on le fait évoluer pour qu’il se rapproche le plus possible du diagramme expérimental.

Pour ce calcul il faut prendre en compte un grand nombre de paramètres :

  • Paramètres identiques pour toutes les phases :

- Les caractéristiques du diffractomètre : géométrie, radiation, longueur(s) d’onde, décalage de zéro, aberrations...
- Le fond continu

  • Paramètres à définir pour chaque phase :

La position, la forme et l’intensité des pics de Bragg

On distingue deux types d’affinements :

  • APCM (Affinement de Profil avec Contrainte de Maille) : les intensités sont affinées librement pour correspondre le plus possible au diagramme expérimental
  • Rietveld : les intensités sont calculées à partir d’un modèle structural dont les paramètres sont affinés

L’affinement de Rietveld permet d’extraire plus d’informations du diagramme de diffraction :

  • Le motif cristallin
  • La microstructure (texture…)
  • Les proportions de chaque phase dans un mélange
Exemple d'affinement de structure avec FullProf
Exemple d'affinement de structure avec FullProf

Analyse au Microscope Électronique à Balayage (MEB)